Sur la nature du dépressionnisme
Dialogue aporétique
Archésilas. — Où vas-tu donc, mon cher Autophane, et d’où viens-tu?
Autophane. — J’arrive de chez Téléthon, fils d’Ikonocrate, et je me rendais maintenant à l’arrêt d’autobus afin de retourner chez moi, sur la Rive-Sud.
Archésilas. — Eh bien, laisse-moi t’accompagner un peu.
Autophane. — Ne te fais pas prier, cher ami! Vois cette ruelle nauséabonde: suivons-la. Mais que vois-je? Que tiens-tu donc dans ta main?
Archésilas. — Oh, ce n’est rien: un petit discours.
Autophane. — Sache que tu es désormais dans l’obligation de m’en dévoiler le contenu.
Archésilas. — Je préférerais me faire empaler, Autophane, plutôt que subir tes critiques!
Autophane. — Archésilas, homme cruel! Pourquoi piquer ma curiosité à seule fin de me priver ensuite d’une occasion d’accroître ma science?
Archésilas. — L’honneur exige que je me défende de cette accusation: je la réfuterai donc en te faisant part des mes réflexions sur le sujet. Mais les dieux du stade sont mes témoins: c’est seulement parce que tu insistes!
Autophane. — Entendu, excellent homme. Mais asseyons-nous plutôt sur le trottoir; à l’ombre de ce magnifique Burger King, nous serons à notre aise pour discuter, bien à l’abri du soleil qui à cette heure est au zénith de son parcours et flambe de tous ses feux. Allons donc: quelle thèse défends-tu dans ton discours?
Yannick Lacroix (1975-2050) a consacré sa vie à la recherche de quelque chose à dire, dans le but de l’écrire. Il n’a jamais trouvé, mais il produisit néanmoins une œuvre importante, ce qui laisse songeur.