Le ventre des Amériques

Que passe la nuit

Mourir puis rentrer à la maison. La main dans le cœur. Un battement et un autre jusqu’au dernier. Je pensais: le ciel veille sur moi. Jour après jour un souffle de vie.

Personne de ma famille n’est mort. Pourtant, la mort existe et il n’y aura pas d’exception.

Personne de ma famille n’est mort et je voudrais être la première. Pour esquiver le tragique du deuil. Plus jeune, je pensais avoir été épargnée. Nous étions vivants et immortels. Puis à l’adolescence un enterrement près de l’hiver. La sœur de mon père.

Qui m’a dit un jour:

Tu as peur de tout. La peur dans tes yeux, tes gestes et surtout dans ta voix.
Il faut que tu sois courageuse. Tu dois vivre et être courageuse.

Des années plus tard, la mort me rattrape. Près de l’hiver avec les membres de ma famille à pleurer cette mort inattendue. Je pensais:

Si loin.

Si loin de chez toi.

Si froid.

Enterrée dans la terre glaciale. Car il fait froid ici. Un froid qui transperce le cœur.

Je pensais:

Je ne veux pas mourir ici.

Haïti.

Tout me ramène à toi. Au seul endroit où je ne crains pas la mort. Où je n’ai plus peur.

Miryam Charles est une réalisatrice, directrice de la photographie et productrice vivant à Montréal. Ses films ont été présentés dans divers festivals au Québec et à l’international.

N° 330: Le ventre des Amériques

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