Inventaire pour non-liseurs
Les heures passées à travailler dans la bibliothèque de Liberté, à faire le tour de son jardin (avec ou sans Jacques Godbout) et de ses différentes cultures me rendent la revue à la fois très familière et toujours un peu étrangère. Ses 45 000 pages imprimées (estimation prudente) conservent pour moi une part de mystère, d’insaisissable: derrière le titre de la revue, combien de noms qui aujourd’hui ne nous disent rien, de rubriques discrètes, de textes inactuels que Boréal n’a jamais publiés dans sa collection «Papiers collés», contrairement à ceux de nombreux essayistes de Liberté?
«Pour non-liseurs»: c’est là le titre d’une rubrique collective, toujours publiée en fin de numéro, qui a duré assez longtemps à Liberté. Dans cet espace qui se présente sous forme de blocs de textes hétéroclites, les comptes rendus (majoritaires) succèdent aux critiques d’articles de presse, les mots d’esprit et les blagues nichées, aux observations sur le temps qui passe et les tournesols qui poussent. Le ton y est tour à tour sérieux et caustique, ironique et critique. Mon «inventaire pour non-liseurs» se propose de reprendre cet «esprit», de mettre en jeu cette pratique périphérique et fragmentaire. L’objectif? Produire une sorte de portrait comparatif, critique, partiel et subjectif de Liberté contre elle-même.