En circuit fermé
À partir de son mixer, la DJ lance la musique. En appuyant sur des boutons, donc. Mais quelles connexions provoquent au juste ses manipulations? Et celles que nous faisons des touches du clavier, du bouton de l’ascenseur, de la sonnette de la maison, du marteau qui fait chauffer l’eau…? Comment donner à voir la mécanique, électrique ou physique, qui les provoque? Quel état les précède et qu’en résulte-t-il? Dans sa dernière production, le Bureau de l’APA explore les connexions possibles entre les fils, les esprits, les matériaux, les corps et les idées.
Fondé en 2001 par Laurence Brunelle-Côté et Simon Drouin, ce collectif de la ville de Québec réfute le principe de la fable ou de la narration en élaborant des spectacles protéiformes dans lesquels la représentation, tout comme la pensée, se déploie par la prolifération des pistes et des médiums. Celui-ci prend la forme d’un cabaret musical. Dès notre entrée dans la salle d’Espace Libre, la DJ Julie Cloutier Delorme nous accueille avec un son électro irrésistiblement dansant. Sur le plateau, qui déborde comme toujours d’objets, d’instruments et de matériaux, on retrouve un musicien (Jasmin Cloutier), un régisseur (Frédéric Auger) et trois performeurs (Simon Drouin, Danya Ortmann et Ludovic Fouquet). Entrez, nous sommes ouverts, comme une invitation à pénétrer dans le laboratoire de la troupe.
Munis de petites pinces, de marteaux ou de bouts de fils, durant près d’une heure trente ils bidouilleront devant nous des mécanismes artisanaux aussi savants que farfelus qui entraînent une longue suite de connexions. Les savoir-faire et les corps sont mis à profit de toutes les manières pour faire passer le courant: les deux moitiés d’un citron pressées ensemble déclenchent une symphonie, la salive échangée dans un long baiser allume le micro pour faire résonner une chansonnette irrévérencieuse, une chaise qui se déplie active une mystérieuse musique, le bout d’un talon haut devient l’aiguille du tourne-disque. Alors que certaines trouvailles charment grâce à leur ingéniosité et aux images inspirantes qui les composent, d’autres peinent à dépasser la démonstration technique.